On the air*
3min -« Vous passez en direct à la radio, mais en différé à la télévision. Joe Biden parle à la même heure ».
Ah… c’est bien la première fois qu’on m’associe dans la même phrase au Président des Etats-Unis, pour laisser entendre que lui et moi sommes en concurrence de communication. Tout arrive. La maquilleuse s’affaire pour faire disparaitre les traces de fatigue. Y a du boulot.
On est, à la Maison de la Radio, juste après l’annonce du « plan de résilience » (!) annoncée par le Premier Ministre. Il s’agit de porter la réaction de la Fédération, c’est-à-dire de tous les professionnels du transport routier, durement impactés depuis des mois par l’inflation des coûts, et frappés depuis deux semaines par l’envolée du prix des énergies.
Dans le studio, les écrans diffusent le direct de toutes les chaines, alors qu’on entend le fil des nouvelles du monde : Zelenski implore le Congrès américain d’envoyer des avions, une famille ukrainienne refugiée témoigne, il y a un tsunami d’ampleur au Japon. Il parait qu’on aura droit gratuitement à huit séances chez le psy. Peut-être qu’il en faudra bien plus à écouter cette pluie de mauvaises nouvelles.
« Ne soyez pas trop technique ».
On a sept minutes. Il s’agit de faire passer les messages : oui ce plan est une avancée car pour une fois il y a bien un chapitre dédié au transport routier. Mais les mesures ne sont applicables au mieux qu’en avril, et c’est tout de suite qu’il faut soutenir financièrement les transporteurs.
Comment dire que le fait que le Premier Ministre évoque des aides complémentaires à négocier avec le Ministère des Transports est une réelle avancée ? Que le matin même le principe n’était pas du tout (mai pas du tout) acquis.
L’urgence est là, et les discussions avec le Ministère des Transports doivent s’engager sans attendre.
Est-ce qu’il y aura des blocages ? Pas avant les négociations. Si elles échouent c’est autre chose.
Vous allez faire quoi ? Ce sont les professionnels qui en décideront, comme toujours.
Puis au détour de la phrase, on parle des coûts du transport, des prévisions du Comité National Routier pour 2022 qui sont déjà dépassées. Si l’énergie continue à rester longtemps à son niveau d’aujourd’hui, voire à des niveaux hauts, que les pénuries perdurent, que les autres coûts progressent encore, alors le niveau d’inflation du transport conjointerait les 12%.
Le journaliste manque de tomber de sa chaise. Mais comment vont faire vos clients pour absorber ces hausses ?
Ah parce que ce seraient aux transporteurs de tout subir au risque de mettre leur pérennité en péril ?
Tout augmente : les matières premières, les denrées alimentaires et pour le transport, service indispensable à l’économie et à la société, il devrait y avoir une exception ?
Même le Premier Ministre, enfin, a passé le message que les transporteurs auraient à répercuter les hausses sur leur client. Ce message est évident pour le monde du transport, mais il a été très peu (voire jamais) rappelé publiquement par les plus hautes autorités de l’Etat.
L’entrevue finie, le travail se poursuit. On est à un moment clé. L’urgence, qui était déjà là, s’accélère.
*Sur les ondes
Florence Berthelot