Coupez les caméras
2min -Un Secrétaire d’Etat français a rencontré cette semaine une personne haut placée de la Commission européenne. On ne dira pas les noms car, outre qu’il ne s’agit pas de cibler les gens, bien peu en France connaissent ces deux personnes. Peu importe. Comme d’habitude, en termes de communication, il est de bon ton de faire un « tweet » avec le message « heureux d’avoir pu échanger avec… » Et pour qu’un tweet soit visible, il faut une photo. C’est là que les choses se corsent : la photo montre deux personnes (que vous ne connaissez pas)… avec un masque. Bon ok ça donne l’exemple mais on n’est pas très avancé ! Quel est le sens de faire une telle photo ? Ça revient à faire une visioconférence avec une personne qui n’a pas de bureau individuel, et qui est donc obligée de porter un masque. Si la consigne est « coupez la caméra pour économiser de la bande passante », la vérité est que cela n’a aucun intérêt de voir quelqu’un dont la moitié du visage (voire les deux tiers) est cachée. On ne sait pas si l’interlocuteur sourit, soupire ou bâille. Peut-être même qu’il vous tire la langue ou fait des grimaces. On ne sait pas. Il parait que 80% de la communication est non-verbale. Aujourd’hui, tout le débat quand on programme une réunion est « présentiel » ou « distanciel ». En bon français, réunion en présence ou à distance. Beaucoup aimeraient se voir en vrai. On peut le comprendre. Mais franchement tenir salon avec un bout de tissu sur le nez, on ne court pas après. Donc merci de nous épargner la vision d’un non-visage. Coupez les caméras et ne prenez pas de photo. Ou alors arrangez-vous pour faire des réunions au restaurant, assis devant une assiette, ou dans un bar, un verre à la main (avant 22h). Ou faites des réunions à vélo, ou en moto (mais dans Paris intra-muros seulement car quand vous quittez le périphérique, les motards doivent porter l’équipement de protection individuelle). Bref, débrouillez-vous – si vous voulez faire de la publicité pour dire « heureux d’avoir pu échanger avec... » – pour nous épargner d’afficher une non-photo. C’est un non-sens.
Florence Berthelot