Face et dos aux murs
3min -Lorsqu’on évoque un mur, on pourrait penser au premier abord, au fait de s’y heurter, comme on se heurte à un refus inflexible. On pourrait citer par exemple l’attitude du Gouvernement face à l’hostilité créée par la réforme des retraites.
Mais il y a d’autres murs.
Lors d’une assemblée générale en région, à l’issue d’un débat sur la transition énergétique, où chaque représentant des constructeurs était venu évoquer la stratégie de son groupe (aucun n’a la même), un transporteur s’est exclamé : « A vous entendre tous, on a l’impression d’être face à un mur ». Sous-entendu, la « décarbonation » semble un obstacle infranchissable. Tant en termes de disponibilités de véhicules, que d’énergies et évidemment de prix.
Michel-Edouard Leclerc, de son côté, nous annonce un mur d’inflation notamment sur les produits alimentaires, avec pour échéance de pic, le mois de juin.
Et voilà Jacques Attali a écrit un article il y a quelques jours un article alarmiste sur une probable crise financière à venir, possiblement durant l’été prochain. En cause, le mur de la dette notamment américaine.
Le Trésor américain a atteint mi-janvier la limite de ce qu’il peut emprunter : 31,4 trillions de dollars. Un trillion c’est un million de milliards. Soit 16 zéros.
En France, avec trois mille milliards de dette publique, cela ne fait que 12 zéros. Quoi qu’il en soit, ces dettes ne sont pas soutenables et par effet domino, font peser de nombreux risques de toutes natures sur nos systèmes économiques et nos modes de vies.
Un mur, on peut imaginer de l’escalader ou même de le contourner. Mais à force de ne voir que des murs partout, le sentiment est celui d’un enfermement complet, d’une absence de sortie. Il semblerait qu’on ne puisse plus que regarder le ciel. Ce qui fait penser à la formule de notre Première ministre avant l’hiver en redoutant les coupures d’énergies : « aujourd’hui nous dépendons du ciel ».
Il faut comprendre « nous dépendons de la météo » et non pas du ciel où se trouverait le Créateur de toutes choses.
Il faut croire que le ciel a entendu.
En attendant, nous voilà face mais aussi dos aux murs. Ce qui n’est ni banal ni confortable. On aimerait bien les faire tomber comme tomba le rideau de fer en 1989, dans la joie et au son du violoncelle. Retrouver les « coudées franches », de la marge de manœuvre.
Juste une lueur d’espoir, une faille entre deux pierres.
Jacques Attali, dans son article propose quatre solutions. Dont celle d’une « réorientation radicale de l’économie mondiale vers un mode de développement nouveau, avec un tout autre rapport à la propriété des biens de consommation et du logement, réduisant à la fois l’endettement et l’empreinte climatique. »
Comprenne qui pourra (ou qui voudra).
Car pour être radical, c’est radical. Et il est n’est pas alors certain que le plus grand nombre admette que la chute des murs n’est plus forcément une bonne nouvelle.
Florence Berthelot