Interview de Florence Berthelot, Déléguée Générale de la FNTR
4min -Florence Berthelot, entrons directement dans le vif du sujet : comment s’annonce la rentrée pour le secteur du TRM ?
Cette rentrée sera forcément très compliquée. Parmi les différentes inquiétudes des transporteurs, il y a d’abord la question du maintien ou non des volumes transportés. Il y a toujours une très forte augmentation des postes de coût, et ce, même si nous bénéficions de la remise générale sur le carburant et que nous avons perçu des aides. Les entreprises ont donc énormément de mal à se projeter. Rappelons aussi qu’il va y avoir de nouvelles négociations sur les minima conventionnels du fait des hausses successives du SMIC depuis le début de l’année. Nous sommes donc certains que les coûts de transport vont fortement augmenter. Quelle va être l’acceptabilité par les clients ? C’est une question... Mais c’est une question de survie pour les entreprises. A cela s’ajoutent également la problématique de la transition énergétique et les perspectives qu’on peut se donner en ce qui concerne les énergies alternatives au diesel, la fin des moteurs thermiques, les ZFE... Au vu du contexte actuel, nous sommes extrêmement dubitatifs sur le fait de pouvoir tenir les calendriers initialement prévus.
Parmi les dossiers prioritaires actuellement sur la table, il y a aussi la question de la pénurie de main d’œuvre...
Oui, et on ne parle pas uniquement de conducteurs... La pénurie est générale. Mais je pense que le Gouvernement en a grandement conscience. Et nous devons tous nous mobiliser pour résoudre ce problème. Nous avons déjà eu une réunion avec le Ministère du travail fin juillet. Et Clément Beaune, Ministre délégué auprès du ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, chargé des Transports, a d’ailleurs rappelé à quel point il s’agissait-là d’une priorité gouvernementale. Du côté des professionnels, chacun essaye de faire de son mieux pour faire évoluer ses méthodes de recrutement, mais aussi ses méthodes de fidélisation, et, en même temps, chacun tâtonne un peu, dans un marché du travail qui a beaucoup muté depuis la pandémie et tout ce que celle-ci a engendré. Nous voyons bien qu’en période de crises nous sommes obligés de changer les choses. Surtout, on se demande si cette évolution n’en est pas qu’à ses prémices. C’est là une question primordiale, et qui rejoint les préoccupations que nous avons depuis longtemps avec les organisations syndicales sur les conditions d’exercices, notamment des métiers de conducteur, et les approches concernant par exemple le chargement ou le déchargement.
Vous venez d’évoquer le nom de Clément Beaune. Une première rencontre a eu lieu le 15 juillet dernier entre le nouveau Ministre des transports et les différentes organisations professionnelles du secteur, dont la FNTR. Qu’en est-il ressorti ?
Ce qui en ressort, d’emblée, c’est une très bonne connaissance des dossiers en cours. Et puis aussi, beaucoup d’écoute. M. Clément Beaune présente également l’avantage d’avoir été Ministre des Affaires européennes, et, dans notre secteur, les dossiers européens sont vraiment très importants en ce moment. Récemment, il y a eu le Paquet Mobilité, son application se poursuit toujours, et, actuellement, c’est le dossier Fit for 55 qui se négocie à Bruxelles... Nous ne remettons pas en cause les objectifs, mais nous nous interrogeons sur les moyens d’y arriver. Ne va-t-on pas être obligé à un moment de redimensionner la voilure en fonction des possibilités qui seront les nôtres ?
Quels vont être les grands rendez-vous de la FNTR en cette rentrée ?
Tout d’abord, nous avons notre grand Congrès annuel, qui se déroulera les 21 et 22 septembre prochains. Un rendez-vous incontournable, que nous avons la joie de reprendre en présentiel après trois années soit sans Congrès, soit en distanciel. Notre thème cette année, c’est : A la croisée des routes. Auparavant, nous étions dans Un autre monde, puis ce fut Changer d’air, etc. Je remarque que nous avons toujours été assez visionnaires sur les thématiques de nos différents Congrès. A la croisée des routes évoque ce sentiment qu’éprouvent aujourd’hui les entreprises, et peut-être aussi chacun d’entre nous. Beaucoup se posent la question : quel chemin pour l’avenir ? Notre but, en tant que Fédération, n’est bien sûr pas de tracer des chemins bien déterminés, mais plutôt d’offrir des visions possibles, en gardant l’optimisme de se dire que nous serons présents encore longtemps, que nous resterons un mode majoritaire, et que l’essentiel de ce qui pourra être fait – notamment en matière de développement durable – passera forcément par nous.
Puis, tout de suite après le Congrès de la FNTR, aura lieu début octobre la nouvelle Semaine nationale du TRM, l’occasion de poursuivre ce que nous avons entamé en 2020, autrement dit de mieux faire connaître et reconnaître notre secteur par les décideurs. A la Toussaint, nous lancerons une nouvelle campagne de communication pour valoriser le secteur et le service qu’il rend quotidiennement aux Français et aux entreprises. Une campagne que nous renouvellerons à Noël. S’en suivra, en fin d’année, la remise du Label Transport & Logistique Responsables. Un Label ESG, dédié au secteur du Transport et de la Logistique, que nous sommes heureux d’avoir créé cette année et pour lequel un certain nombre d’entreprises se sont présentées. Un beau succès, donc. Enfin, nous allons plus que jamais continuer à traiter nos différents sujets de fond et autres dossiers au long cours (en matière d’emploi, recrutement, développement durable, social…) tout en anticipant sur l’avenir. D’année en année, les entreprises s’adaptent. La FNTR s’adaptera aussi toujours.