A la marge
3min -Les travaux sur la feuille de route de la décarbonation du secteur des transports routiers se poursuivent à un rythme quasi frénétique. 5 groupes de travail, une copie à rendre pour fin décembre, des réunions plénières et de co-rapporteurs. Ça ne chôme pas.
Les objectifs ont été fixés au départ. La part de la motorisation diesel pour les camions doit passer de 95% aujourd’hui à 2% en 2040. La part de l’électrique de 0 aujourd’hui à 50% en 2040 et celle du GNV de 5% à 39%. Pour l’hydrogène, objectif final 9%.
Le tout avec bien entendu des étapes à horizon 2025 et 2030.
De là, on travaille avec les constructeurs pour savoir si la production de véhicules suivra et avec les énergéticiens pour déterminer si les énergies alternatives seront disponibles.
En cours de travail, on s’aperçoit vite que selon les secteurs et les usages, le mix énergétique sera bien différent entre le secteur voyageurs, marchandises ou BTP.
Plus on avance, et plus il devient évident que le mix énergétique justement obligera à faire des choix basés sur « il n’y en aura pas pour tout le monde ». Notamment pour les carburants liquides décarbonés (HVO-XTL), que tout le monde réclame car ils n’obligent pas à acheter de nouveaux véhicules.
Plus engageant encore, cela va finir par flécher les énergies en fonction des secteurs. Bio-diesels vers l’aérien, GNL pour le maritime, etc...
On n’aura pas vraiment le choix.
Dans le transport routier, les questions qui finissent par se poser sont : quid si la production de camions ne suit pas, quid si les énergies alternatives ne sont pas disponibles ? Ces questions ne sont pas de pure forme quand dans la situation actuelle, les prix du gaz et de l’électricité font douter les transporteurs les plus optimistes sur leurs choix d’investissement.
Que se passe-t-il, si les travaux faisaient apparaitre que les objectifs fixés ne sont pas réalisables ?
La réponse est : on modifiera les objectifs mais « à la marge ». On ne sait pas l’épaisseur de cette marge. Un pouillième, une virgule ?
La seule marge que l’on connaisse est celle d’une entreprise de transport. Et celle-là est plus que ténue.
Car en réalité, même si les nouveaux camions et les énergies alternatives devaient être au rendez-vous, il conviendra de savoir à quel prix. Et si ces prix sont inaccessibles, quels que soient les accompagnements financiers et autres mis en place, les entreprises ne pourront tout simplement pas investir.
Apparemment, ce n’est pas le sujet. Et pourtant c’est tout le problème. Il ne faut pas perdre de vue l’aspect économique extrêmement coûteux de la démarche.
A ne pas vouloir l’aborder, le risque est majeur de voir la transition énergétique ne se faire qu’à la marge.
Florence Berthelot