Lucie oh Lucie
-Lucie oh Lucie
Alors que le ministre de l’Économie a, dans ses vœux aux acteurs économiques, entendu souligner que la France miserait sur l’intelligence artificielle, et qu’un sommet « pour l’action sur l’intelligence artificielle » (?) s’ouvrira à Paris le 6 février, un robot conversationnel prénommé Lucie a été rendu public le 23 janvier. Pour être fermé moins de trois jours après.
Présentée comme un ChatGPT à la française (rien que ça), la plateforme est la lauréate du programme France 2030, lancé par l’État et devait servir pour l’éducation ou la recherche.
Hélas, trois fois hélas ! Testée par les internautes, elle a rapidement fait l’objet de critiques voire de moqueries. Incapable de réaliser des calculs simples, fournissant des réponses fausses, il est apparu qu’aucun garde-fou contre les propos haineux n’avait accompagné son lancement.
Bon d’accord, les internautes sont facétieux et ont posé des questions bizarres : pourquoi la racine carrée d’une chèvre est-elle égale à 1 (ben oui on se demande) ? Que sont les œufs de vache ? La pauvre Lucie n’a pas compris la moquerie : « Les œufs de vache aussi appelé œufs de poule sont des œufs comestibles produits par les vaches »…
Les fondateurs ont beau dire que ce lancement était prématuré et qu’il ne s’agit que d’un projet de recherche, il va falloir trouver autre chose.
Car les géants américains et chinois ont pris de l’avance. La progression de ces IA auto-apprenantes est arithmétique. Les déclinaisons se multiplient. On peut être fasciné par le progrès, les incidences sur les emplois vont rapidement se faire sentir.
Hasard malheureux du calendrier, le nouveau Président américain annonçait la création d’une entreprise de 500 milliards de dollars dénommée Stargate. Certes le nom est moins sexy, et rappelle le film et la célèbre série de science-fiction, mais l’ambition est là. Deux géants américains, une banque japonaise et un fonds d’investissement des Émirats arabes unis ont pour objectif de créer les infrastructures pour la future génération d’IA.
Zéro fonds publics. Que des investissements privés.
C’est quand même d’une autre ampleur que notre pauvre tentative française qualifiée de « niveau CP » par les utilisateurs.
On peut se consoler avec Albert, moins connu car non destiné au grand public, une IA au service des agents publics. Albert aide les conseillers de France Services à répondre plus efficacement aux demandes des usagers. Il peut même aider les greffiers à rédiger des résumés de procédures.
On peut juste regretter que ce qui est possible pour le fonctionnement de l’État ne soit pas accessible directement aux usagers. Mais ne désespérons pas : cela arrivera peut-être un jour.
C’est assez révélateur de l’approche française (outre le fait de donner des prénoms humains à des algorithmes). Nul doute que les entreprises privées ont déjà compris tout l’intérêt qu’elles pouvaient trouver dans le recours à ces IA. Et le transport ne sera pas un secteur en reste…
Bon je vous laisse. Il y a Brad Pitt qui m’attend en visio. Le pauvre, il a des problèmes et attend que je lui envoie des sous. Déjà que je fais le nécessaire pour payer l’avocat de Keanu Reeves pour qu’il le sorte de prison…
Florence Berthelot