Notes et commentaires
-
Le grand philosophe Audiard disait « C’est curieux chez les marins ce besoin de faire des phrases ». On le paraphrasera volontiers en énonçant « c’est curieux chez les politiques ce besoin d’avoir un langage martial ».
Bon, ça fait quelques années que nous sommes en guerre : contre un virus (on avait même un Conseil de Défense), contre la Russie (ah non, nous ne sommes pas en guerre contre la Russie, du moins officiellement), contre l’inflation. Nous devrions nous mettre en « économie de guerre » et, de toutes façons, nous sommes en guerre économique.
La dernière en date, c’est le ministre de l’Economie qui nous dit que nous sommes en état d’urgence budgétaire. Voilà autre chose. Il faut trouver au moins 40 milliards d’économies et pas seulement 5 milliards comme l’annonçait trois jours avant la ministre des Comptes publics.
Le Premier ministre en rajoute une louche en créant un « Comité d’alerte budgétaire ».
Il parait qu’on est trop endettés. Non ?! Pas possible ?! Quelle surprise surprenante !
Il faut donc faire un effort sans augmenter les impôts. Ben voyons. On y croit…
C’est comme si quelqu’un avait l’idée de lancer une grande conférence sur le financement des infrastructures de transport en jurant la main sur le cœur qu’on ne parlera pas du tout d’écotaxe. Toute ressemblance avec…
Entretemps, on a vécu une séquence inédite. A savoir l’agence de notation Moody’s qui refuse d’actualiser la notation de la France car cela pourrait aggraver une situation délicate pour un « Gouvernement fragile ».
On vit dans un monde formidable : imaginez un élève complètement nul, qui ne fait strictement aucun effort, n’a aucune discipline et fait des phrases en permanence pour couvrir son ignorance crasse. Voilà que les professeurs décident de ne plus le noter pour « ne pas aggraver la situation ».
J’en connais qui me diront que c’est déjà ce qui se passe dans certaines classes, mais ce n’est pas le sujet.
Qu’est-ce qu’on risque à noter l’élève à son juste non-investissement ? De l’empêcher de dormir au point qu’il ait du mal à sortir du lit ? A en faire encore moins ? Cela fait penser aux perles des professeurs dont une des meilleures est : « A touché le fond mais creuse encore ». Ou aux excuses authentiques mais fumeuses de parents « X… a fait la fête tout le week-end et était donc trop fatigué pour venir en cours ce lundi. »
C’est la prime au n’importe quoi. Il faudrait inventer d’autres expressions que « mettre la poussière sous le tapis » ou « regarder pudiquement ailleurs ». Des ballons d’essai sont lancés sur les plateaux télé : sous-indexer des retraites, retarder des dépenses. Il faut prendre ses responsabilités.
D’accord. Alors, on le lance quand le grand audit des dépenses publiques ? Parce que nous on veut bien qu'on puisse traiter de populistes ou de fous, ou de délirants, ceux qui se sont lancés dans ce travail dans d’autres pays, mais en attendant ils font exactement ce que nous, nous ne faisons pas. Et d’expérience, dans les entreprises et les ménages, on ne pourrait pas atteindre ce niveau de gravité parce que cela fait longtemps que les mesures adaptées auraient été prises.
Comme quoi c’est pas le tout de tenir un langage martial, faut assurer derrière. Mais ceci est une autre histoire.
Florence Berthelot