Semaine Nationale du TRM : Pascal et Frédéric Megevand, gérants de l’entreprise Megevand Frères
3min -Nous traversons actuellement une crise sans précédent, et ce, depuis plusieurs mois. Comment faites-vous face à cette situation ?
Frédéric Megevand : Pour l’activité transport, nos deux pôles principaux sont la distribution pour le compte de la GMS (communément appelée « grande distribution ») et l’industrie agro-alimentaire (boissons sans alcool). La part de CA réalisée avec l’industrie restant minoritaire.Un certain nombre de clients nous suivent depuis 1993. Nous avons toujours été partisans d’ une politique de partenariat de long terme… Résultat, cela nous a particulièrement aidé lorsque cette crise a débuté. Nos clients se trouvant dans la même galère que nous, nous avons eu besoin les uns des autres. Cela fait trente ans que nous travaillons ensemble, dans un profond respect mutuel, en misant sur la régularité, source de véritable rentabilité à nos yeux. En définitive, notre pôle agro-alimentaire n’a pas été touché. Au contraire, il s’est même renforcé, ce qui nous a permis de contrebalancer avec le pôle industrie, où, là, tout s’est arrêté. On s’en sort donc très bien. Nous n’avons pas eu recours au chômage partiel et nous n’avons demandé aucune aide. Notre entreprise – à taille humaine – s’est parfaitement adaptée à la situation. Aussi parce que nous avons su tirer les enseignements de la crise de 2008. En gros, c’est un mélange de chance mais aussi de stratégie, de positionnement. Alors, certes, nous avons eu un creux au mois d’avril (-7%) mais ce n’est pas catastrophique. Cette période a par ailleurs boosté notre partie logistique, désormais en très nette progression. L’augmentation des volumes sur une activité de produits de désinfection pour les hôpitaux, nous a amené à monter un projet de robotique. Nous avons signé pendant la pandémie, et là, nous nous trouvons dans la phase ultime, celle de la mise en route, puisque ce projet sera justement inauguré à l’occasion de la Semaine Nationale du TRM. Un investissement qui, outre le fait de nous permettre d’accueillir de nouveaux clients, sera également un pourvoyeur d’emplois.
Pascal Megevand : Nous n’avons pas attendu la Covid, ou tout autre chose, pour se poser des questions sur l’avenir de notre profession et de notre secteur. Depuis toujours, nous essayons d’avoir une longueur d’avance, et ce, quels que soient les sujets. Celui de l’énergie, par exemple. Nous avons attaqué la réflexion en 2010, cela commence à dater… A l’époque, tout le monde partait du principe que l’énergie n’était pas un sujet de discussion, parce qu’il y avait le gazole, le gazole, et encore le gazole. Nous, de fil en aiguille, nous en sommes arrivés à identifier le GNV, et j’insiste bien sur le « Nous avons identifié. » C’est à la suite de plusieurs recoupements et études que nous sommes tombés sur le GNV. Cela nous permet aujourd’hui d’avoir une longueur d’avance. Nous sommes par exemple un des rares transporteurs en France à avoir 55% de notre parc en énergie alternative.
Notre principal avantage est d’être deux, Frédéric sur la gestion au quotidien, et moi, tourné vers l’avenir. C’est cette vision à long terme qui va certainement nous sauver, et assurer la pérennité de l’entreprise.
Quel regard portez-vous sur les dernières prises de paroles politiques qui semblent avoir « oublié » le monde du transport routier ? Il y a quelques mois, on parlait pourtant de « soldats de la deuxième ligne... »
Pascal Megevand : Mais, on en attendait quoi de ces prises de parole, au juste ? Je pose la question à tous nos confères : « Qu’attendions-nous ? » On a fait notre boulot. Point. Oui, on a des situations compliquées, mais les gens nous renvoient d’abord l’image que NOUS leur envoyons. J’en suis persuadé. Pour cette Semaine du TRM, on a lancé l’invitation, et, en retour, une centaine de personnes nous ont répondu. Et tout ça, sans faire le moindre battage médiatique. Simplement, nous les avons invité à découvrir ce que nous faisions. C’est un positionnement, compris par les invités. Et j’encourage vivement la FNTR à poursuivre ce genre d’événements. Avant de demander quoi que ce soit, commençons déjà par FAIRE. Nous n’avons absolument rien à nous reprocher, nous n’a pas à rougir de ce que nous savons faire, mais il faut aussi savoir le dire, et accepter de le dire. C’est ça qui est important. On ne changera pas l’image que les autres ont de nous tant qu’on ne changera pas nous-même notre propre image. C’est une certitude.
Frédéric Megevand : Le problème avec le monde du TRM, c’est qu’il a de multiples interlocuteurs : qu’il s’agisse du domaine réglementaire, de l’environnement, du grand public… Et on nous tape de tous les côtés. En plus, nous vivons dans un monde où on ne se rend plus compte de rien. La Convention citoyenne nous demande de former nos conducteurs ? Mais… comme si on avait attendu que quelqu’un nous dise ça ! Idem sur le fait de devoir suivre notre consommation… Si on ne suivait pas notre consommation, on n’existerait plus depuis longtemps.
Justement, vous avez ouvert les portes de votre entreprise hier, jeudi 1er octobre. Quels ont été vos invités ? Et que devons-nous retenir de ces rencontres ?
Frédéric Megevand : Nous avons principalement invité nos élus locaux, les représentants de la ville d’Annecy, ainsi que nos Présidents de communauté de communes… Etant donné le contexte, nous ne pouvions pas multiplier les invitations et les visites. Ce que nous attendons avant tout des pouvoirs politiques, c’est de la stabilité. Et une vision.
Pascal Megevand : Le plus important est que chacun s’investisse, surtout en local. Tout part du local. Nous n’avons pas invité préfets et autres personnalités un peu éloignés. Volontairement. Nous les connaissons. Commençons déjà par essaimer autour de nous. Cela favorisera l’effet « infusion. » Untel va en parler à un ou dix autres, et ainsi de suite. Si nous devions donner un conseil, c’est vraiment celui-là. Se tenir près de ses élus locaux. C’est le meilleur relais que l’on puisse avoir. Et toujours avec cette démarche d’aller vers l’autre et d’expliquer. C’est vraiment ce qu’il faut retenir. Et c’est en ce sens que la Semaine Nationale du Transport Routier de Marchandises est une excellente initiative.