Sinapisme et moule à gaufres !
3min -J’ai connu un couple il y a longtemps qui avait choisi, en cas de dispute, de se vouvoyer. C’était une manière d’établir une certaine distance, en cas de crise conjugale, pour faire tomber la pression. Outre le fait que c’était très amusant à entendre, ce mariage tient encore aujourd’hui.
Sans doute, faudrait-il user de stratagèmes de cette nature pour relever un peu les débats publics. Car chacun notera que, si le ton monte de plus en plus, le niveau s’effondre.
Alors que certains réseaux sociaux interdisent carrément les gros mots, au risque d’en être banni, des personnalités publiques ne se gênent plus pour ne pas montrer l’exemple, sans doute pour donner une image plus proche du commun des mortels, qui parle vrai et sans détours.
Le plus haut personnage de l’Etat lui-même, il y a quelques mois, a utilisé un terme que la décence m’interdit de répéter ici, à propos des personnes non vaccinées. Cela voulait dire, autrement, qu’il avait envie de les « enquiquiner ». Mais ce n’est pas exactement ce qui fut dit. Il aurait pu aussi dire qu’il avait envie de leur empoisonner la vie, mais vu le contexte, ç’aurait pu être (encore plus) mal pris.
Voilà que le ministre de l’Intérieur a suivi il y a quelques jours. Se plaignant de la vivacité de l’opposition notamment de gauche sur la réforme des retraites, il l’a accusée de…….. (Bip ! Un mot que la décence etc) …. le débat. Il aurait été peut-être plus judicieux de dire que les opposants à la réforme des retraites rendaient le débat confus.
Ou carrément d’inventer un mot : « lupanariser » le débat. C’est déjà assez compliqué comme ça pour ne pas y rajouter des formules un peu rudes. Même d’ailleurs si, en face, on n’est pas en reste.
Les Français sont par nature assez directs, mais ils sont nombreux à considérer qu’il y a des choses qu’on ne dit pas, en tous cas en public. Sauf quand il s’agit d’humoristes. Et encore…
Ils se lassent des invectives, interpellations, injures et insultes que s’envoient à la tête des gens qui ne sont pas d’accord entre eux.
Peut-être gagnerait-on tous à utiliser d’autres termes ? Par exemple, on pourrait s’inspirer de l’impressionnant florilège du capitaine Haddock !
Imaginons, dans ces conditions, ce que pourrait donner un échange entre deux adversaires politiques :
« Vous êtes un jocrisse, un Janus, un janissaire !
Certes, il ne faut pas avoir de bégaiement ( « Vous êtes un jo... jo… jocrisse, un ja… ja… janissaire ») ou un zozotement ( « Vous êtes un zocrisse, un Zanus, un zanissaire... » )
Cela aurait incontestablement une autre… figure.
Notons qu’il n’est pas nécessaire que cela ait un rapport avec le sujet ou même que cela veuille dire quelque chose. Il y a de jolis mots dont personne ne connait plus ce qu’il désigne : « Espèce d’anacoluthe ! Bande de catachrèses ! Tout ceci n’est phylactère et carabistouille ! ».
Ouah !
Les passes d’armes au Parlement, ou sur les plateaux télé, deviendraient nettement plus supportables car, tant qu’à s’insulter, autant le faire avec élégance et style.
« Je ne parle avec un simili martien à la grasse de cabestan !». « Gardez vos réflexions, mitrailleur à bavette ! ».
A défaut d’avoir du fond, on y mettrait un peu les formes.
Enfin un peu de tenue, tonnerre de Brest !
PS : Un membre du Conseil National de la FNTR m’a fait remarquer cette semaine, que mes éditos étaient de bonnes préparations aux réunions de nos instances. Là clairement, j’espère que non.
Florence Berthelot