Tout ce qu’on oubliera

Une célèbre enseigne de VTC publie chaque année le palmarès des objets oubliés dans les véhicules. La majeure partie de ces objets relèvent de l’oubli classique (Lunettes, écouteurs, valises). Le téléphone arrive en tête (enfin, si l’on peut dire...) évidemment. La rédactrice de ces lignes se remémore avec émoi (et essoufflement) la course poursuite dans les rues de Paris après un taxi dans lequel le téléphone était resté à charger. Bénis furent les embouteillages parisiens ce jour-là…

Evidemment, il y a aussi dans le classement la liste des objets plus insolites. Les citer permet d’imaginer à quel point ils devaient être précieux pour être réclamés. Quoique…

En 2020, crise sanitaire oblige, on a oublié des masques, des ordonnances, des résultats d’analyse. Rien de vraiment étonnant.

Mais il y a des choses plus bizarres. Ainsi, que quelqu’un ait fait une réclamation pour 5 baguettes de pain ou un bocal de cornichons laisse un peu songeur. On comprendrait mieux la demande portant sur « un sac de courses rempli à craquer de fromages ». Là on sent à travers le détail de la demande le manque cruel, le dîner gâché, le gourmet frustré.

D’autres fêtes ont aussi été, semble-t-il, ternies. Notamment les mariages car manifestement (et on ne sait pas si ces objets ont été égarés ensemble), le fait qu’on réclame une robe de mariée, des alliances et une cravache (heu… peut-être pas la cravache) laisse à penser que le grand jour ne s’est peut-être pas passé normalement.

Cela relève quasiment de l’acte manqué. Je serai un des époux, je m’inquiéterais.

Et puis il y a des choses qui peuvent sembler plus mineures mais qui ne devaient pas l’être tant que ça puisque les passagers étourdis se sont manifestés pour les récupérer : de l’argent, des chèques-vacances, une poêle, une couronne de Noël, une bouteille de champagne ou d’alcool 12 ans d’âge (quand même !), de la nourriture pour oiseaux, un luminaire, une perruque, une trottinette électrique (?), un « dîner en Tupperware » (re ?), une roue de secours. 

« Une sangle en cuir très clair argentine qui sert pour les taureaux » ou une « attestation de citoyenneté », un doudou (ouh la la ! le doudou !)  sont aussi dans la liste... Sans parler de la personne qui a oublié son contrat de travail et qui devrait sans doute s’interroger sur ce que Freud en penserait.

Un vrai inventaire à la Prévert. Qui prouve la diversité de ce qu’on peut transporter. C’est-à-dire tout.

Si une palme devait être décernée sur l’oubli le plus saugrenu, et bien que les finalistes soient difficiles à départager, ce serait celui… d’une prothèse de main. On peut imaginer que celui qui l’a égarée n’en avait pas besoin et qu’elle était destinée à quelqu’un d’autre. Sinon, il ou elle s’en serait rendu compte, non ?

Le problème c’est que si on commence à oublier sa main, c’est qu’on n’est pas loin d’oublier sa tête.

Florence Berthelot