Les couleurs de l’automne
3min -En regardant autour de soi, on voit la nature qui jette ses derniers feux. Ici un arbuste a pris une teinte orange qui semble ruisseler sur l’herbe. Là c’est un buisson devenu acajou, un prunus devenu violet, et les arbres sont auburn. Le bleu du ciel a pâli. En prêtant attention, on décèle d’autres coloris. Quelques touches de vieux rose tentent en vain de masquer les roches noires ou bleues marine.
Mais ce qui frappe ce sont toutes ces nuances possibles de jaune. C’est cela, il y a plus de jaune que d’habitude. Il s’est répandu partout, s’est infiltré dans la grisaille, court d’un point de la forêt à l’autre. Il se disperse tant bien que mal mais çà et là il résiste comme un incendie trop difficile à éteindre. Quelques feuilles vertes s’accrochent désespérément aux branches sans parvenir à s’imposer. Elles semblent ne pas savoir qu’elles sont caduques. Les persistants vert foncé pointent de façon presque arrogante leur cime vers les nuages gris qui s’accumulent. Sans doute quelques-uns seront sacrifiés pour Noël et parés de guirlandes multicolores. Mais l’heure n’est pas à la fête. Les fourmis industrieuses peinent à suivre leur chemin. La colonie risque de manquer de ravitaillement. Vient le temps où l’on marchera sur un tapis de feuilles étouffant le bruit des pas, le son des voix et les cris.
Le pourrissement général dégage une odeur humide. Certains aspirent à rentrer chez eux, et à se calfeutrer. D’autres veulent encore admirer le spectacle. La lumière décline. La nuit survient chaque jour un peu plus tôt. Jupiter entre dans le signe du Sagittaire. L’hiver arrive. Tout va bientôt se figer. Les arbres dénudés se découperont en noir sur un ciel blanc glacé. En attendant la promesse d’un printemps. Ou d’un grand soir de solstice. Il va falloir peut-être mettre un bonnet…
Florence Berthelot